A la poursuite du papillon
Salut !
Les vacances se terminent, elles furent courtes mais bien remplies et j’ai pu fêter dignement mes 20 ans ! Cette année je vais à Nancy, à l’ENSAIA (sauf modification de dernière minute), une école d’agronomie.
Le texte que je vous montre aujourd’hui a été écrit après les écrits, durant le week end de la pentecôte, léger répit avant la reprise des cours. Pour l’écrire je m’étais installée dans le jardin du foyer à cette période où le temps semblait hésiter entre la pluie et le soleil. L’idée de ce texte m’a été donnée par Jacky, fidèle lecteur de ce site.
Les photos qui l’accompagnent ont été prises au bois de Boulogne et au Crouesty en Bretagne cet été.
J’espère qu’il vous plaira,
Bye et bonne lecture !
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A la poursuite du papillon
Il y en avait deux. Deux cages. Une à quelques centimètres de moi et l’autre à plusieurs mètres. Presque alignées dans l’horizon courbe de mon regard on aurait dit qu’elles se répondaient. Peut-être regrettaient elles la distance les séparant, deux sœurs exilées ; ou bien pleuraient-elles cette absence, ce vide au fond d’elles, papillons envolés.
Seules subsistaient quelques pétales tombées du ciel, d’un nuage en fleur ou d’un arbre qui s’éveille, souvenir d’un temps déchu, d’un amour qui s’est mû en bruissement d’aile. Instant d’éternel.Puis la pluie avait commencé à battre la mesure et des gouttes à glisser le long des barreaux, comme si elles souhaitaient les enlacer, les rendre aussi fluide qu’elles l’étaient. Dans les cages même la pluie se fanait.
Ni la douceur du soleil,
Ni la tourmente d’un orage,
Ni le murmure de l’eau à nos oreilles
Pas plus que le pépiement des oiseaux ;
Ni les regards qui se croisent, floraison du désir,
Ni les corps à l’abandon.
Et jamais l’envol du papillon.
Alors pourquoi cette plume dans ma main ?
Soudain il était apparu, étrange vision dans un paisible jardin. Sa fourrure avait le gris des nuages, être sans contours qui gronde mais ne fait reculer les murs, masse sombre où perçaient deux yeux me fixant, prisons des mondes.
Je n’essayais pas de le caresser. On n’apprivoise pas la liberté.Alors tout devint flou, eau qui embrume nos regards, dilue la réalité tel l’encre sur ma feuille, images troubles de surfaces qui s’étirent et se compriment dans le creux de nos pupilles, comme un rêve pris de folie ; une distorsion de l’esprit…je cours.
Mes griffes pénètrent dans la terre meuble sur laquelle je prends appui pour mieux m’élancer. Un battement de paupière puis tout disparaît : les murs encerclant le jardin, les habitants, les voitures et le bruit assourdissant de la ville. Il ne reste que la route déserte bordée d’immeubles si grands qu’ils semblent masquer le ciel.
Mais les papillons toujours plus haut s’élèvent.Je sens tout mon corps en mouvement, chaque muscle, chaque fibre, le vent qui glisse autour de moi, semble me happer ; l’humidité encore présente sur la fourrure et les gouttes d’eau qui s’envolent. Prise de vitesse.
Lentement les forêts succèdent aux villes, les plages de rochers aux falaises escarpées, les déserts brûlants aux plateaux enneigés. Tout se mélange et se confond, les paysages et les saisons, les flutes et les violons.
Je vois des lacs de glace couverts du sang de l’automne, des dunes ensevelies sous des pétales de roses…deux cages qui volent en éclats, des murs qui s’effondrent, des étangs de verre qui se brisent telles les gouttes d’eau sur ma feuille, des barreaux qui fléchissent puis perdent toute consistance.
J’entends un loup qui hurle à la Lune de le laisser s’envoler rejoindre les papillons, une bête humaine qui refuse les frontières et les murailles, les limites de l’imagination, ce rêve en cage qu’un enfant laisse s’enfuir, le temps de quelques lignes, de quelques paysages…Et puisque le loup ne peut s’envoler, le papillon sur ma plume vient se poser.
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